Ma note : 4 étoiles sur 5
Notez que j’ai lu l’édition de 2009 parue aux éditions Écosociété. Une édition révisée de cette ouvrage est parue début 2018.
Pour les voyageurs au long cours, le sujet du tourisme est épineux mais quasi-universel. Jean-Didier Urbain aura consacré un livre entier au touriste, cet Idiot du voyage, ainsi qu’à la dichotomie qui l’afflige. Mais la perspective historisante et théorisante d’Urbain n’est certainement pas aussi accessible que cet essai.
La lecture du Manuel de l’anti-tourisme de Rodolphe Christin me donne l’impression de lire Urbain qui aurait rajeuni, Michel Franck qui aurait épuré un manuscrit ou encore l’une de mes personnalités cachées, celle qui s’en veut de promouvoir le tourisme, qu’il soit durable, éthique ou alternatif.
Citant abondamment les autres auteurs qui se sont interrogés sur le sujet, Christin parvient à intéresser le voyageur aimant se distinguer du touriste à la problématique entourant cette fausse dichotomie ainsi qu’aux effets pervers du tourisme, qu’il soit vécu par un voyageur explorateur ou par le plus lambda de vacanciers. Le propos ne va pas par quatre chemins et l’égo en prend un dur coup. Sachant les dégâts du néo-colonialisme capitaliste, comment peut-on faire l’éloge du voyage aujourd’hui ? À la fin de chaque chapitre, j’avais envie de supprimer mon site et me faire ascète dans une caverne, idéalement une de mon propre terroir…
Un peu pamphlétaire, ce manuel est le plus convainquant de tout les livres que j’ai lus sur le sujet. Il se lit rapidement, documente assez bien son point de vue et l’argumente, vous laissant seule sur d’amères réflexions. Sans retomber bêtement dans l’habituel manichéisme, il s’attaque au TOURISME, à l’industrie de la vacance, cette institution capitaliste du temps libre qu’il faut à tout prix meubler, organiser, rentabiliser. Disséquant ces pratiques, il en fait ressortir les aspects néfastes, y compris ceux qui nous semblent à première vue si positifs, en bons ethnocentristes que nous sommes.
On pourrait croire le pronostic extrêmement pessimiste tant le contenu ne fait pas de quartier. Certes, l’on trouvera des contre-exemples, on aura envie de dire « Oui, mais moi, je… », mais dans l’ensemble, on aura bien de la difficulté à lui donner tort.
Cette lecture rapide devrait figurer dans les bibliothèques de tous ceux qui se prétendent voyageurs et non touristes. À vrai dire, je le relirai dans quelques années, pour me rappeler d’adopter une démarche itérative et réflexive. Malgré moi, je fais somme toute partie d’une industrie. Pour détruire à coup d’humilité mon solide égo de voyageuse et minimiser l’impact de mon néo-colonialisme… Et aussi parce qu’au dernier chapitre sont colligées des idées, des pistes de solution, des espoirs. Et qu’il fait bon d’espérer.
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