Blogs voyage & responsabilité morale – Réflexions et manifeste

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Janvier 2011. Je participais depuis près de deux ans à la co-écriture d’un guide, la Bible du grand voyageur. Mon expertise du voyage alternatif était déjà reconnue dans certains milieux, notamment pour l’auto-stop et la sécurité sur Couchsurfing. J’avais plusieurs fois fait des conférences et ateliers sur ces sujets en anglais et l’on m’invitait fréquemment aux quatre coins de l’Europe. Voir la chronologie de mon implication.

À cette époque, ni Nans, ni Guillaume ni moi n’étions connus du marché francophone. Notre livre nous semblait avoir un potentiel énorme, mais nous le savions à contre-courant sous plusieurs aspects. On y parlait de faire du stop, de fouiller dans les poubelles et même de parcourir certains pays sur les trains de fret, chapitre qui fut coupé à l’édition. Nous n’avions aucune certitude que ce livre serait publié de façon traditionnelle. Du haut de mon 63e parallèle, j’ai eu l’idée de fonder Globestoppeuse pour avoir une vitrine francophone sur le Web. C’était mon deuxième blog et mon cinquième site Web.

Mais un blog, c’est quoi ?

À l’époque, c’était la révolution du Web 2.0, de l’Internet se tournant vers le social, l’interaction, la conversation. Un Web log, c’est d’abord un format de site Web proposant un journal (log) présenté de façon antéchronologique (du plus récent au plus ancien). Il se distingue des anciennes formes de sites qui se voulaient moins dynamiques ou évolutives, notamment les sites vitrines ou statiques. On est donc passé à l’ère de la création continue de nouveaux contenus, du commentaire et de l’interaction. De grands médias d’information on rapidement repris grosso modo cette structure de publication et on a vu des journaux migrer vers le web, proposant une version en ligne sous un format similaire.

J’ai eu mon premier blog en 2002. Un journal extime, un espace anonyme pour y consigner mes états d’âme et les partager à une audience ciblée. J’y pondais quelques poèmes et je partageais mes bilans et mes états d’âmes. Je n’avais pas d’autre responsabilité que de me conformer aux lois en vigueur dans mon pays et aux politiques de la plateforme de publication. Ça me laissait une liberté énorme que l’on retrouve encore dans certains recoins du Web comme tumblr ou livejournal. Mais force est de constater, les blogs ont bien changé.

L’ère du SEO, du ROI et de la mercatique

Fini le temps des bannières payés au clic ou à la surface en pixels ! Nous ne sommes plus anonymes, nous sommes désormais des influenceurs. Nous sommes à l’ère du SEO et des réseaux sociaux. Le blog a pris sa place en tant qu’outil médiatique.

Devenu « créateur de contenu », le blogueur s’est professionnalisé. Pour séduire une audience, générer du ROI (return on investment) et négocier son influence, il devient un homme-orchestre – certains diront un couteau suisse – jouant du marketing de contenu, de l’écriture, de la photographie, de la vidéo, de la gestion de communauté, de la négociation, du branding, trois quatre bidouilles en webdesign, le hashtag hip sur Instagram et puis le temps réel sur Snapchat et sur les prochains réseaux sociaux à la mode qui dorment encore dans leur berceau de silicone…

Je n’avais pas anticipé ce virage. Quand j’ai reçu de premiers messages me proposant des partenariats, je les ai naïvement étudiés un à un. Souvent, je ne comprenais pas pourquoi on venait me solliciter, qui et pourquoi. Après tout, en dix ans de blogging anonyme, personne n’était venu me proposer de partenariat !

Une réflexion sur l’éthique

Je profite d’une invitation faite par Samuel du blog Les vents nous portent pour approfondir la réflexion amorcée il y a quelques mois sur les diktats des blogs voyage.

Contexte. Samuel a invité les blogueurs voyage à se prononcer sur leur responsabilité morale envers les lecteurs après avoir vu passer en août dernier une vidéo d’un Youtubeur britannique vertement critiqué dans la presse. Louis Cole était parti kiffer la life en Corée du Nord et vantait les beautés de ce pays en se concentrant sur les « bonnes vibrations. »

Dans notre communauté voyage, les avis étaient partagés. Beaucoup estimaient que les destinations et la ligne éditoriale relevaient du domaine du choix personnel. D’autres s’indignaient face aux blogueurs, youtubeurs et instagrammeurs vendus qui étaient prêts à faire la putaclic dans les pays sous dictature, les plaçant sur un pied d’égalité moral avec la propagande, le greenwashing, l’achat de likes, le plagiat et la fraude.

Samuel m’a taguée dans cette discussion et je lui ai rappelé que ceci n’est pas un blog. Est-ce que j’ai des choses à dire, moi qui n’ai pas de partenariats, de blogtrips, d’articles de type Destination ? Selon Samuel, oui dans la mesure où ce que j’écris sur le voyage est public et que je fais partie de la communauté. Beh ça tombe bien, parce qu’il y a bien des choses qui me dérangent et que je voulais mieux définir ma position.

Choses qui me chicotent

  • Partenariats qui parlent de tout et de rien – on me propose souvent la livraison de repas à domicile ou les pneus de voiture…
  • Sollicitations que je reçois de la part de « nouveaux blogueurs » qui sont en fait des compagnies déguisées (Marco Vasco, allo !)
  • La réponse que l’on m’a donnée quand j’ai parler de décoloniser notre discours quand on parle des autochtones : on s’en tape…
  • Confusion entretenue entre le travail de blogueur, de journaliste et de web marketeur

Contrairement à mes collègues Samuel, Laurent et Alexandra, j’ai choisi de ne pas m’attarder à la question du blogging voyage jugé en vertu du pays ou de la région visitée – dictature, positions politiques, impact écologique – pour moi ça, c’est l’éthique du voyageur plus que du blogueur. J’ai plutôt voulu explorer la responsabilité morale du blogueur voyage vis à vis de ses lecteurs.

Pourquoi est-ce que je ressens le besoin de me détacher d’un milieu où j’ai pourtant des amis et des gens dont je respecte le travail ?

Dessine-moi un blogueur voyage…

Avant d’analyser le blogueur voyage et sa responsabilité morale, il convient de définir ce qu’il est. Je postule que comme pour tout autre mode de communication, certaines questions se posent :

  • Qui est-ce qui communique ? Un blogueur, c’est d’abord un individu qui s’exprime sur un sujet qui le passionne. En étant lu par des membres d’une communauté, il crée en quelque sorte un micro-média.

  • Pourquoi est-ce qu’il communique ? Les motifs varient grandement. Je suppose qu’on le fait normalement pour partager son ressenti sur des lieux, des gens, des manières de faire qui sont différentes de celles de son lieu d’origine, pour informer sur des pratiques alternatives, typiques ou étranges, pour susciter la réflexion, la sienne et celle des autres, pour inspirer, faire rêver, donner suite et sens à son voyage.

  • À qui veut-il le dire ? Il s’adresse à ses lecteurs, des proches ou des curieux qui cherchent à découvrir, à comprendre, à s’inspirer, à voyager depuis leur canapé, à l’accompagner sur la route, à rêver…

Être blogueur professionnel

Vivre de sa plume tout en voyageant m’a semblé séduisant. Après tout j’avais déjà sollicité avec succès des dons de mes lecteurs dès 2009…

Seulement, le blogueur pro tel qu’il se conçoit maintenant n’est pas payé pour écrire. Il est payé pour atteindre un public, la communauté qu’il influence.

Il se retrouve un peu entre l’arbre et l’écorce, le cul entre deux chaises. D’une part, il doit attirer et conserver l’attention d’un lectorat avec lequel il entretient une relation. De l’autre, il doit répondre aux attentes de son sponsor s’il veut gagner correctement sa vie.

Or, s’il y a bien une chose que j’ai comprise en rédigeant des guides de voyage, c’est que l’on peut difficilement servir deux maîtres en même temps. Quand je suis payée par une maison d’édition, je sers principalement ma maison d’édition et donc son lecteur. Un jour, dans un Office du Tourisme (OT), un employé m’a dit que nous « nous servions le même objectif, le tourisme. » Non, pour ma part je sers le touriste. Il y a une différence. Je n’ai pas à satisfaire les attentes des gros acteurs du tourisme si je trouve que leur offre n’est pas pertinente pour mon lectorat.

Un cas où ça fait une différence : au Québec, rares sont les entreprises amérindiennes qui cotisent aux OT. Elles ne sont donc pas toujours répertoriés dans les publications et le personnel des l’OT n’est pas toujours formé à leur sujet. Le tourisme auprès des autochtones est pourtant l’un de centres d’intérêts des voyageurs…

Être ou ne pas être journaliste

Pour en revenir au blogueur voyage professionnel, la question revient fréquemment :

  • Est-il un individu qui s’exprime ?
  • Est-il un rédacteur de média
  • Est-il un journaliste ?

Je crois qu’à partir du moment où il cherche à gagner de l’argent ou à obtenir des gratuités, il n’est plus qu’un individu qui s’exprime, il est un agent de marketing pour celui qui le paie et son travail s’apparente dès lors au publireportage.

S’il est un média, comme certains gros blogs multirédacteurs, les blogs officiels de publications, de compagnies, d’association, sa parole est liée aux règles propres à son contexte professionnel. Il y a généralement un contrôle sur ce qui est dit, ce qui est de la publicité doit être présenté comme tel, etc. Dans tous les cas, Il est redevable à quelque chose de plus gros que lui et la responsabilité est portée par les deux entités, à mon sens.

S’il est journaliste, il est soumis au cadre éthique associées à sa profession et à l’univers médiatique. Pour moi, le travail de journaliste est un art délicat et assez encadré et le blogueur s’en approche parfois mais n’en endosse pas la responsabilité. À tout le moins, on peut le comparer au chroniqueur dont l’objectif n’est pas d’informer le lecteur.

Agent de marketing professionnel

En glissant du personnel au professionnel et de l’intime à l’influence, l’intention réelle du communiquant devient ambiguë. Malgré son désir d’être transparent vis-à-vis des lecteurs – et d’ainsi se conformer à la loi – je pense qu’il y a forcément perte d’indépendance et donc de qualité. Après tout, la relation blogueur-lecteur fait partie de la prestation proposée au sponsor !

Le blogueur professionnel, il bosse dans la pub. Et s’il vous dit que non, c’est qu’il donne aussi dans les relations publiques.

La responsabilité morale du blogueur voyage, c’est de clarifier sa position.

Il ne peut pas alléguer être un individu qui s’exprime et donne son opinion indépendante alors qu’il fait un boulot de publiciste. Il ne doit pas prétendre être sur un pied d’égalité avec les journalistes, même s’il les côtoie et que ceux-ci font parfois un boulot analogue. Il doit être transparent sur sa démarche à chaque étape non seulement pour être en règle avec la loi mais aussi pour éviter de frauder ses lecteurs.

Quelques rares cas – des créateurs de talent

Loin de moi l’idée de cracher sur la communauté des blogueurs voyage ou de dire les blogueurs professionnels sont à proscrire. Il n’y a pas de mal en soi à bosser dans la pub. On peut faire un excellent boulot !

Le blogueur pro talentueux arrive à être transparent tout en minimisant l’impact du partenariat sur la relation avec les lecteurs et ça c’est tout un art. Je pense que c’est possible lorsque l’on est déjà éminemment talentueux dans au moins un des trois axes (écriture, photo, vidéo), que l’on publie depuis un certain temps et que l’on ne met pas tous ses œufs dans le même panier.

Choisir de faire la promotion d’une destination sous un angle novateur, avec un œil artistique, explorer la frontière entre le court-métrage et la pub… Le travail de certains de mes collègues me fascine. Amis blogueurs qui ont une composante pro, sache que j’admire votre maîtrise cet équilibre délicat digne des plus grands slacklineurs !

Quelques centaines de blogueurs voyage et moi, et moi et moi

J’aime imaginer ce site comme un bout de terrain où je construis ma maison virtuelle. Je la construis à mon image : un peu carrée, madame Je-sais-tout, et puis grande ouverte car j’aime bien y héberger des voyageuses et des passionnés d’auto-stop.

Je n’ai jamais voulu de gros panneaux d’affichage sur mon terrain. À vrai dire, je suis même en réaction profonde avec la publicité qui nous envahit dans toutes les sphères de notre vie. Je ne veux pas être un outil de marketing pour l’industrie du tourisme, cela ne sert pas mes objectifs.

  • Qui est-ce qui blogue ? Anick-Marie – Experte en écomobilité, spécialiste de l’auto-stop et du vélo solaire, féministe, conférencière, autrice…

  • Pourquoi est-ce que j’écris ? Pour avoir pignon sur Web en français, pour susciter le partage de trouvailles liées à mon domaine et me garder au fait des tendances de la culture route. Pour développer mon sens critique quant à la lecture et l’écriture de voyage. Pour rencontrer plus facilement des lecteurs de mes ouvrages édités. Pour faire la connaissance d’autres passionnés et déclencher des projets et de l’inspiration mutuels. Pour garder des traces des connaissances que j’accumule. Pour effectuer une analyse et une synthèse qui approfondissent ma vision d’experte.

  • À qui est-ce que je m’adresse ? Aux voyageuses et voyageurs alternatifs – afin qu’ils voient qu’ils ne sont pas isolés. À mes lecteurs passés, présents et futurs d’ouvrages édités, aux passionnés d’écomobilité, aux voyageurs réflexifs critiques cherchant à déconstruire leurs préjugés et à comprendre leur impact sur le monde.

Le mot de la fin

Je crois que le métier « d’influenceur » n’est qu’une des modes du Web, comme j’en ai vu passer d’autres depuis 20 ans : les bannières, les tonnes de mots clés, les cercles de liens, Adsense, les liens sponsorisés avant le nofollow et autres façons pas toujours sympa de gagner de l’argent.

Et si je manque d’argent pour nourrir mes invités, dans le pire des cas, on ira fouiller dans les poubelles !

 

12 Commentaires for “Blogs voyage & responsabilité morale – Réflexions et manifeste”

Laurent

dit :

J’aime bien cette phrase : « pour moi, le travail de journaliste est un art délicat et assez encadré et le blogueur s’en approche parfois, mais n’en endosse pas la responsabilité ». Sur le papier (enfin sur l’écran plutôt), je suis spontanément assez d’accord. Mais c’est comme tout, même si journaliste est un métier que j’admire à bien égards, j’ai l’impression qu’une partie de la profession (je ne saurais donner une proportion) est assez éloignée de cet art délicat.
Bien d’accord par contre sur le fait que le blogueur n’en endosse pas la responsabilité.
Quant à l’encadré en bleu, c’est un résumé assez brillant je trouve !
Merci pour le clin d’oeil 🙂

Globestoppeuse

dit :

Ça a été un exercice particulier et tu vois que je suis partie dans une direction tout autre que la vôtre, mais je suis très contente d’avoir enfin mis des mots sur mon malaise. J’espère que mon travail s’approchera du travail de journaliste dans le futur, mais je sens bien qu’il me manque quelques clés, quoi qu’en pense mon rédacteur en chef adoré 😉 Pour le moment, je me vois plutôt comme une vulgarisatrice. En rétrospective, c’est quand même marrant que la forme (blog) ait fini par structurer aussi fortement le contenu que l’on crée et partage…

Itinera magica

dit :

Ce texte est passionnant et radicalement original, j’adore ta façon d’aborder les choses. Je pense que tu occupes vraiment une place à part dans le monde du blogging, et même si jamais au grand jamais je ne prendrais un train de fret (brrr!), j’admire ton côté aventurière sans concession.
Égoïstement, bien que je sois blogueuse pro, je n’ai pas de dilemme moral car je me sens avant tout écrivain. Je suis là pour raconter. On me donne un sujet, et je raconte des histoires. Je n’ai aucun problème à annoncer les partenariats et sponsors, je le fais toujours, ça s’apparente à du mécénat et ça a toujours existé. On me lit parce qu’on aime mon ton et mon style, moins pour des conseils pratiques, et ça me va très bien. Je ne suis pas TripAdvisor, je ne suis pas là pour donner des notes de 1 à 10. Je suis là pour raconter des histoires, toujours éminemment subjectives. Du coup je n’ai aucun souci à préciser les contextes.
Merci pour ce papier passionnant.

Globestoppeuse

dit :

Voilà, tu pourrais te retrouver dans cette phrase « Je pense que c’est possible lorsque l’on est déjà éminemment talentueux dans au moins un des trois axes (écriture, photo, vidéo), que l’on publie depuis un certain temps et que l’on ne met pas tous ses œufs dans le même panier. » Je pensais à Corinne Stoppelli, aux Coflocs, à Madame Oreille notamment en rédigeant cette phrase. Et je pense que ça s’applique à ton blogue également. Comme disait Xavier cité dans l’article de Geo, tu es plutôt dans les raconteurs d’histoire et c’est une posture plus axée sur ta production artistique d’écrivante !

Marie Bambelle

dit :

Bonjour, je viens d’arriver par hasard sur ton blog en suivant un lien et cet article est le premier que je lis. Il me passionne et je suis entièrement d’accord avec toi sur tous les points.
D’abord fan, j’ai cessé de lire des blogs de voyage il y a deux ans. Trop de pub, pas assez de récits. Moi ce que j’aime, c’est qu’on me raconte des péripéties. Pas qu’on me dise dans quel hôtel manger ni où dormir.

Question subsidiaire : tu parles d’un article sur « decoloniser notre discours sur les autochtones  » qui n’a pas eu l’audience que tu espérais. Moi il m’intéresse beaucoup, car c’est une question que je me pose quotidiennement en voyage. Pourrais-tu me donner le lien ?
Merci d’avance et encore bravo pour ce superbe article !

Globestoppeuse

dit :

Bonjour Marie, merci pour ton commentaire positif 🙂
Pour la partie de décolonisation du discours, il s’agit plutôt d’un post que j’avais fait dans un groupe Facebook de blogueurs voyage. J’avais été franchement déçue car même certains blogueurs voyage pour lesquels j’avais une certaine admiration m’avaient tenu un discours du genre « on ne peut plus rien dire au sujet des autochtones », « on est trop censurés, on manque de liberté pour dire ce que l’on pense »… Et pendant ce temps-là, je continuais à lire des horreurs d’enfants gâtés qui n’ont pas l’expérience touristique dont ils ont rêvé et qui n’a jamais existé, qui n’est qu’une projection coloniale, à mon humble avis. So much pour la découverte des autres cultures quand ce que tu veux c’est avoir des indiens qui dansent autour de toi avec des plumes sur la tête sans égard aux moments des powwows ou au rapport au sacré des danses ou des parures de tête…

Quand j’étais bébé voyageuses, on m’a fait vivre ce genre d’expérience touristique au Pérou, sur l’île d’Amantani. On m’a grimée en « authentique locale » et fait danser dans une fête locale (organisées sur mesure pour les flottes de touristes, faut pas rêver). J’ai tout avalé – je savais que les locaux avaient un peu de contrôle sur cette façon de faire les choses, c’était proposé dans le Rough Guide… C’est « normal » de rechercher une expérience haute en couleurs ! Mais quand on progresse, qu’on devient quelqu’un de lu, de suivi, d’écouter, je pense qu’il faut oser pousser la réflexion plus loin, d’autant plus si celle-ci est inconfortable. Si notre tourisme individuel reproduit les torts du tourisme de masse, il ne faut pas s’imaginer qu’il lui est supérieur. Si l’on veut réellement connaître un lieu et ses habitants, on ne peut pas rester dans la consommation et la société du spectacle.

Tiens je suis tombée sur un autre article qui entre en profondeur sur le sujet ô combien colonial de l’authenticité. Et j’avais traduit à une époque un article sur le privilège occidental pour amorcer une réflexion sur le sujet.
Au plaisir d’échanger avec toi !

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